Le 20 juin 1792, une émeute populaire a lieu à Paris
et les Tuileries sont envahies.
Le parti de la Gironde déterminé à venger la disgrâce des trois ministres
de son choix, a recours à une insurrection. La foule où se mêlent des
ouvriers des quartiers Saint-Antoine et Saint-Marceau, des femmes, des
invalides, des enfants, des gardes nationaux, des charbonniers, des
mendiants, tous portant piques, bâtons ferrés, marteaux, haches, des
écriteaux, des bannières, avance vers l'Assemblée.
C'est le brasseur Santerre, aidé du boucher Legendre, de l'orfèvre
Rossignol, de l'imprimeur Momoro qui dirige l'avant-garde. Arrivés au
Manège ils demandent l'admission des pétitionnaires par la Législative. Le
cortège ayant forcé les portes, il faut bien voter l'admission.
Les tribunes sont agitées après le discours révolutionnaire de Huguenin.
Les députés gardent un silence consterné. Au bout de trois heures Santerre
offre un drapeau au nom des citoyens du faubourg Saint-Antoine et quitte
la séance. Le peuple se répand dans le jardin des Tuileries et entraîné
par le groupe de la Gironde, envahit le Carrousel. Ils occupent la cour
Royale puis entrent dans le château. Le Roi se tient dans le grand salon
de l'Oeil-de-Boeuf avec trois de ses ministres, le vieux maréchal de
Mouchy, Madame Elisabeth, les chefs de légion Acloque et La Chesnaye et
quelques grenadiers loyalistes.
La porte du salon est ébranlée de coups de massue et de hache. Le roi
donne l'ordre d'ouvrir et sans l'intervention d'Acloque, le boucher
Legendre aurait attenté à la vie du roi. Apostrophant le roi, il lit un
factum injurieux. Vers lui s'avance un homme qui lui présente un bonnet
rouge au bout d'un bâton. Louis XVI le porte sur sa tête. On lui offre une
bouteille de vin et s'humiliant à nouveau le roi dit: "Peuple de Paris,
je bois à votre santé et à celle de la nation française".
Pendant près de quatre heures le roi va subir les invectives, les
quolibets de la foule qui demande la sanction des décrets Le roi se borne
à répondre qu'il fera ce que la Constitution lui ordonne de faire. Pétion,
le maire de Paris qui est derrière l'émeute réussit en flattant les
manifestants, à leur faire quitter la salle.
A la suite de ces évènements, des adresses, expressions des voeux d'une
assemblée, furent envoyées au Roi. Montargis fit la sienne.
"Sire,
Pénétrés de la plus profonde douleur et de la plus vive indignation en
apprenant les entreprises détestables par lesquelles on a cherché à
troubler la sérénité de vos jours, il n'existe au-dessus de ces sentiments
dans nos coeurs, que notre admiration pour les vertus sublimes de votre
Majesté !
Règnez longtemps, Sire, pour la gloire des François dont l'amour pour leur
Roi a été dans tous les siècles le caractère distinctif entre tous les
peuples du monde;
Règnez heureux, votre félicité est inséparable de celle d'une Nation dont
votre amour a accepté et juré de maintenir la Constitution.
Ce sont ces voeux qui seront adressés à Vore Majesté d'une extrémité de la
France à l'autre dont vous supplient d'agréer l'hommage
Sire
Vos très humbles, très obéissants et très fidèles serviteurs les citoyens
de la Ville de Montargis".
De nombreuses signatures; elles représentent les trois Ordres. Certains
font suivre leur nom de leur titre: Bizot -maire-, Aumont -vicaire-,
Jacques Milandre -notaire-, Louis Fortin -boucher-, Plouvier -directeur
des Aydes- de Birague Lilledon -mousquetaire-, et, entre autres... Guéneau
qui ajoute à son nom, son titre "curé de Nargis".
Tous ces signataires étaient loin de penser que cette adresse leur serait
préjudiciable, à un point tel que pour certains, elle allait leur coûter
... la tête.
Le 20 ventôse an II de la République, 10 mars 1794 - vieux style comme on
le disait-, le représentant du peuple Lefiot qui avait chassé de toutes
les fonctions publiques les personnes qui avaient signé l'adresse au Roi,
voulait encore les faire passer à la censure publique. L'évènement eut
lieu à Montargis dans le Temple de la Raison.
L'objet de cette séance publique était l'exécution d'un arrêté du
représentant du peuple, daté de Gien du 3 ventôse, concernant des mesures
révolutionnaires contre des individus royalistes signataires d'une adresse
au tyran Capet, contre la salutaire insurrection du peuple du 20 juin
1792.
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