Sa griève maladie se déclara dans le mois de septembre. L'abcetz se
forma; il y fallut faire des ouvertures et des incisions, la penser deux
fois le jour, avec les douleurs qu'on peut s'imaginer en une personne qui
a le dos ouvert presqu'à moitié, d'où l'on voyait la respiration des
parties du dedans, jusqu'à souffler la bougie qui éclairoit pour la
penser. Après une consultation, fut résolu de luy couper une cotte.
La pauvre patiente étant consultée ce qu'elle choisiroit qu'on fit
cette opération, par le fer ou par le feu, elle s'abandonna à ce qu'on
trouveroit pour le mieux, quoy que plus pénible pour elle, qui demandoit
qu'à faire la volonté du Seigneur et non la sienne. L'opération ne fut pas
faite parce qu'on la trouva trop mal.
Vertu non commune, désir de mourir, patience héroïque, douceur et
résignation sans mesure, c'est ce qu'on ne peut trop admirer dans cette
chère sur.
Après qu'elle eut fait sa rénovation des voeux en novembre avec les autres
religieuses, à ses maux ordinaires (1) se
joignit une violente fièvre, hidropisie (2),
fluction de poitrine, rengrégement de ses playes, qui firent juger qu'il
étoit temps de luy faire recevoir ses sacremens; elle les demanda et les
receut avec une piété et une dévotion très édifiante. Elle eut le temps de
recevoir deux fois le Saint viatique.
Elle fut assistée et confessée par le Père supérieur qui l'avoit assistée
au sacrifice de sa proffession; il le vit consommé dans celuy de sa mort,
arrivée le 17 ème décembre de la même année 1652, dix mois après sa
consécration, rendant doucement son esprit à Dieu, presque sans agonie.
On rapporte que quelque peu de temps avant sa mort, elle parut très
effroyée, disant qu'elle voyait un petit more proche son lit. La
religieuse qui la gardoit, s'approchant d'elle pour la rassurer et l'exorter,
dit qu'elle sentit quelque chose d'invisible et de fort qui la repoussoit.
On jeta de l'eau bénite à la malade, et elle rentra dans son calme,
victorieuse du démon qui ne cesse point d'essayer à nous perdre jusqu'à
l'extrémité".
Voilà, la vie et l'histoire de Madeleine Thiballier, sur Ursuline à
Montargis. Ce texte nous fait découvrir un être tenace volontaire. La
narration nous la présente courageuse, malgré la douleur de ces "
quelques maux ordinaires ".
On apprend aussi que son père, François de Thiballier décède quelques
temps avant septembre 1652, et que sa mère vit encore.
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